19 déc 2019

Voyage d'études paysan : deux jours de folie chez les Belges

Les paysan·ne·s en Belgique !

Pour la 5e année consécutive, le réseau AMAP IdF a organisé un voyage d'étude pour les producteurs en AMAP, le 2 et 3 décembre dernier. L'occasion de créer du lien entre les paysan.ne.s participant.e.s, de rencontrer d'autres paysans ou partenaires dans des contextes différents et le temps d'un périple de 2 ou 3 jours. Comme chaque année, ils·elles étaient nombreux·euses à prendre 2 jours pour aller à la rencontre de nouvelles fermes, de nouveaux acteurs agricoles hors Ile-de-France.

Cette fois ci c'était la Belgique avec ses GASAP (Groupement d'Achat Solidaire de l'Agriculture Paysanne). Nous avons eu la chance de passer un moment avec le réseau GASAP (Réseau AMAP local) ainsi qu’avec une bénévole de Terre en Vue (Réseau Terre de Liens local)

La thématique : les fermes collectives !

5 fermes avec 5 expériences différentes

Ferme familiale collective en élevage, coopérative regroupant des activités de maraîchage, élevage, boulangerie, foncier mutualisé mis à disposition par des propriétaires, côtoient des lieux de vie et une école Steiner. Ce sont donc 5 fermes plus ou moins anciennes, avec 5 expériences uniques, que les paysan·ne·s francilien·ne·s ont pu découvrir. Les témoignages des paysan.ne.s belges qui ont accepté de nous livrer un peu de leur quotidien ont permis de questionner le modèle agricole belge, de rapporter de nouvelles idées en Ile-de-France pour voir comment faire évoluer les fermes, d’inspirer aussi ceux et celles qui portent le projet d’une installation en collectif.

Quelques témoignages :

Un jardin en auto-ceuillette : ou comment avoir le "ventre plein"

« C’est sous les frimas belges que nous avons découvert 5 fermes paysannes de la région de Bruxelles. Si toutes fonctionnent selon un modèle semblable, la recherche de synergie entre cultures animales et végétales, les mises en pratique sont extrêmement variées. Au Chant des cailles, les animaux font de l’écopâturage dans le verger d’un couvent, tandis que les mangeurs adhérents viennent récolter les légumes de leur panier selon la production maraîchère.»

« De très belles rencontres comme Martin, maraîcher dans un parc en périphérie de Bruxelles dans un quartier entouré de logements sociaux : la coopérative du chant des Cailles. Le projet est au départ une utopie participative : une AMAP en auto-cueillette ! l'enjeu du partage de la production est poussé au maximum. Chacun se sert en fonction de ses besoins en suivant une démarche d'auto-gestion de groupe alimentée par des réunions très régulières tout au long de l'année et ça marche et c'est beau !!! »

  

En effet cette ferme coopérative, invite chaque Gasapien.ne.s (au total c’est 388 parts de récolte à l’année) à avoir « le ventre plein », chacun peut venir se servir autant de fois qu’il le désire en veillant toujours au partage équitable. Il y a un contrôle social qui se met en place naturellement. Au sein de la ferme, un tableau récapitule les légumes que les gasapien.ne.s peuvent cueillir la semaine dite et la localisation sur la ferme. Un système de drapeau de couleurs a été mis en place pour indiquer si les planches de cultures peuvent ou non être récoltées. De plus la ferme a également poussé le côté solidaire du prix du panier : une fourchette de prix : entre 310 e et 420€ par an. Depuis l’instauration de ce prix solidaire, il y a seulement une année où ils n’ont pas eu le bon chiffre d’affaires.

« A la coopérative Graine de vie, cochons et poules pâturent en bonne intelligence. »

La deuxième ferme que nous visitons est à Grez, à une heure au sud-est de Bruxelles. Nous avons rendez-vous avec Graine de vie, la Coopérative au sein de laquelle travaillent 4 personnes dites "porteurs de projet" : 2 maraîchers, un éleveur de porcs, un boulanger. Nous passons un temps avec Johann, maraîcher puis avec Eric qui s’occupe des animaux. Le cheptel est constitué de 48 porcs de race Mangalika (Race de Hongrie mais avec souche de cochon ibérique) qui font le bonheur des yeux de tou.te.s les participant.e.s. Éric nous raconte qu’ils sont "tout content qu’il y ait du gel ; ils se sentent vivre ces cochons". On en apprend plus sur l’organisation du parcours et les contraintes de ce métier.

  

Une coopérative lancée grâce à un groupe de femmes : les jardins d'Artheys

La journée se termine aux Jardins d’Artheys ; cette coopérative lancé grâce à un groupe de femmes. Certaines sont maintenant coordinatrices du projet, éleveuse ou boulangère au sein de la structure. Ici c’est dans un petit château que nous passons la soirée, c’est un propriétaire terrien qui met à disposition un lieu et des terres pour que les porteur.se.s de projet puissent développer une agriculture biologique. Malheureusement il fait nuit ; impossible de visiter la ferme. Sébastien (maraîcher) et Floriane (coordinatrice) nous parlent de leur organisation. Ils soulignent que les outils coopératifs sont moins développés qu’en France. La coopérative propose de mutualiser certaines taches (comptabilité…). Ils se posent encore beaucoup de questions sur leur modèle et avancent pas à pas.

La ferme de Stée ; une conversion nécessaire pour "ne pas mourir comme ca"

Le deuxième jour nous reprenons la route pour la ferme de Stée, au sud de Namur, "ferme familiale (3 enfants et Marie-Claire) en production de vaches chèvres et brebis, avec transformation fromage et découpe de viande. Cette ferme a effectué sa petite révolution  pour devenir bio, autonome (autonomie fourragère), avec commercialisation en circuit-court, le tout dans une démarche en opposition au « système », afin de se sauver d'une situation financière sans issue.» « Chez Marie-Claire le bon sens paysan a pris le pas sur les pratiques conventionnelles qui minaient le moral et les finances des agriculteurs : quoi de plus normal que de faire son fromage et sa charcuterie, après tout ? ». Tout le monde habite sur la ferme et chacun.e sait ce qu’il a faire, l’organisation du temps de travail et des tâches à effectuer tournent bien.

Des paysans, la tête dans les étoiles

Enfin, » chez Louis Larock, où on applique les principes de la biodynamie, les paysans ont un peu la tête dans les étoiles. En plus des légumes et du fromage, on cultive une drôle de variété : des enfants de maternelle ! Peut-être nos paysans de demain ? ».
« On apprend aussi les problèmes fonciers beaucoup plus complexes et moins régulés qu'en France. Nous revenons pleins d'idées et d'expériences et de projets pour l'avenir... »
Colette, bénévole de Terre en vue, nous raconte les débuts de l’association et la mobilisation pour acquérir les quelques hectares que Louis Larock voulait transmettre. Peter, le maraîcher en biodynamie a pu s’installer il y a 10 ans et le fils de Louis est en train de reprendre l’activité d’élevage laitier. Nous comprenons que la nouvelle génération de la ferme n’a pas forcément la même vision d’avenir que les anciens mais ils arrivent à trouver un équilibre pour que le projet collectif continue d’avancer et d’évoluer.

« Une course-poursuite contre le temps plus tard, et nous voilà déjà de retour en Île-de-France, heureux d’avoir rencontré des agriculteurs dynamiques et plein d’idées, qui font vivre le bio et notre Terre à tous. »

« J'ai adoré le voyage d'étude. Les fermes visitées et les paysans étaient géniaux, le groupe super sympa et intéressant. Dommage que ça ne dure que 2 jours...
Surtout apprécié : le caractère local et urbain de la ferme du Chant des Cailles et l'état d'esprit très "perma" de la ferme Larock, leur système de rétention d'eau aussi !
Quelle chance d'avoir pu participer à ces 2 jours ! »

Et en 2020 ?

Certains ont évoqués la Bretagne en 2020 ou le nord de l’Italie. Et côté thématiques ? Plusieurs envies : aller plus loin sur les semences paysannes et les plants faits localement pour apporter encore plus d’autonomie sur les fermes, les abattoirs mobiles, imaginer des mutualisations de certains postes à l’échelle territoriale, le rapport au temps de travail…

Au-delà des fermes, les structures (type ARDEAR, CIVAM, FDCUMA, RHENAMAP etc.) locales seront contactées.

Alors à vous maintenant :
• Si vous avez envie d’aborder d’autres thématiques, si vous avez des contacts intéressants sur place en Bretagne, en Italie : faites-le nous savoir !
• Ce sont principalement des éleveurs, et des maraîcher·ère·s qui se sont exprimé·e·s, mais parce que le réseau est beaucoup plus riche encore, éleveur·euse·s, arboriculteur·euse·s, paysan·ne·s boulanger·ère·s, exprimez-vous et rejoignez-nous !
• Envoyez-nous dès maintenant vos idées pour les ateliers de réflexion.

Autres infos :


Les semences paysannes finalement accessibles aux jardiniers amateurs

Après des années de débat, la vente des semences paysannes aux particuliers est désormais autorisée. Ce texte de loi met donc un terme au monopole de grands groupes dont le lobbying avait payé jusque là.

Mais plus concrètement, en quoi cela est-ce important ? L'autorisation à la vente des semences paysannes a une dimension environnementale. Il s'agit en effet de semences garantes de la biodiversité. De plus, cela signifie qu'il sera désormais possible de faire pousser les fruits et légumes que vous souhaitez. Terminées les fraises et tomates sans goût !

Il n'existera plus de restriction stricte en matière des semences qui seront à votre disposition. Qu'attendez-vous pour vous remettre au jardinage ? Votre potager peut désormais accueillir une grande variété de fruits et légumes !

Si vous avez encore des doutes, n’hésitez pas à nous contacter !

Par Lucie Humbaire, chargée de mission « Installation agricole et accompagnement des paysans » au réseau, avec les témoignage des paysan.ne.s

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