30 mai 2020

AG 2020 : un amapien vous raconte deux temps forts

Les conséquences de l’état de siège sanitaire, depuis le 17 Mars, lié à la pandémie du Covid-19 ont quelque peu éclipsé, au sein de l’AMAP, cet évènement, à un moment où une des priorités était de répondre à la demande accrue en légumes et autres denrées alimentaires ! Nous avons ainsi eu l’occasion « inattendue » d’apprécier nos producteurs.
Finalement, cette période de contraintes qui a bouleversé nos habitudes, notre vie tout court, a poussé à un autre regard sur certains aspects de notre existence ... par exemple : un regain d’intérêt pour la question centrale de la sécurité alimentaire et de place de l’agriculture dans notre pays !

Mais cette AG ne doit pas être mise aux "oubliettes". 

Quelques points à souligner au coeur de cette journée : 

  • Un dispositif majeur pour accompagner les candidats et candidates à la création d'une ferme en AMAP : le pôle ABIOSOL, en rapport étroit avec le Réseau des AMAP Ile- de- France et 4 autres structures :

ABIOSOL (Agriculture BIOlogique SOLidaire, 47 av. Pasteur 93100 Montreuil) est le moyen central qui épaule notamment le mouvement des AMAP. Il favorise les installations et les transmissions en agriculture biologique et paysanne dans l'Ile-de-France, avec des accompagnements, des formations, des visites de fermes, des temps d'échanges, des mises en commun des équipements et des compétences apportés par les diverses structures réunies. Le but est d'aider à passer de l'idée à l'installation effective des "aspirant-e-s" paysans.

  • *Les Champs des Possibles*: coopérative d' expérimentations ("couveuse pédagogique") et d'activités agricoles et rurales , avec tests "en grandeur réelle" des projets;
  • *Le Groupement des Agriculteurs Biologiques d'Ile-de-France (G.A.B.)* : représente et soutient les producteurs franciliens certifiés Bio et en conversion, avec un but : la
    promotion de ce type de fermes dans la Région, l'intégration dans un réseau de professionnels, sans oublier le lien avec les opérateurs économiques, collectivités notamment comportant des enjeux comme l'eau, la biodiversité , etc;
  •  *Terre de liens Ile de France***: organise un portage citoyen des terres et bâtiments agricoles (SCI, GFA, Foncière, Fondation) qui sont mis à disposition des futurs agriculteurs. Elle conseille et suit les porteurs de projet, paysans, citoyens et collectivités sur les questions de préservation du foncier agricole et d'installation en Bio. Accéder à une surface cultivable est une des conditions premières de cette "relève agricole"! La spéculation immobilière est un grave danger pour ce renouveau agricole : les prix de la terre ont augmenté de 50% en 20 ans ; chaque semaine, en France, 630 hectares d'espaces agricoles et naturels sont recouverts de béton !
  • *AFOCG IdF *(Agir pour la Formation Collective à la Gestion en Ile-de-France) veut aider les agriculteurs dans la gestion de leur exploitation et vise l'autonomie décisionnelle des paysans, via des formations en comptabilité, direction de leur ferme, sans oublier les formations thématiques: ressources humaines, fiscalité et juridique, informatique. L'AFOCG est membre d'un groupe d'experts existant depuis plus de 30 ans, une de ses compétences est le "prévisionnel économique" .
  • Enfin, *le Réseau des AMAP d'Ile-de-France *(même adresse que le Pôle ABIOSOL) regroupe les amapien-ne-s et les paysan-ne-s qui agissent ensemble autour d'un même objectif: maintenir et développer une agriculture locale, paysanne , bio et citoyenne. Ses actions s'articulent aussi autour de la pérennisation des partenariats et de l'installation de candidats-paysans, etc. Le Réseau milite également auprès des institutions (Gouvernement, Parlement, Parlement européen, Conseil Régional et Conseils départementaux, etc.) et différents décideurs, d'un modèle agricole écologique, économiquement viable et socialement équitable.

  • Rencontre avec Silvia Pérez-Vitoria, invitée à l'A.G. du Réseau des AMAP Ile-de-France ;

Présentation :

Economiste, sociologue, productrice de films documentaires sur le mode de vie des paysans vivant dans diverses régions du monde (Espagne, France, Roumanie, Mexique, USA, Nicaragua, Erythrée, etc.) , Silvia Pérez-Vitoria est journaliste spécialisée dans l'étude des mouvements alternatifs paysans et dans les questions agricoles; elle écrit des articles dans 'Le Monde diplomatique" et dans "L'Ecologiste" .

Quelques unes de ses priorités et ses engagements:

Proche d'associations comme le "Mouvement des Sans-terre", créé au Brésil, et "Via Campesina" (fondé en 1993), coordination internationale d'organisations de paysans et de salariés agricoles, pour la défense de ces catégories de travailleurs, pour l'accès à l'eau ressource essentielle, lutte contre l'accaparement des terres, etc.

Elle se positionne en faveur d'un monde paysan fondé sur l'autosubsistance, mais contre l'agrochimie, la monoculture, les OGM et l'ultramécanisation de l'agriculture.

Parmi ses ouvrages, 3 livres publiés aux éditions "Actes Sud":

"Les paysans sont de retour" , 272 pages (en 2005) ;

"La riposte des paysans" , 292 pages (en 2010) ;

"Manifeste pour un 21ème siècle paysan" , 192 pages (en 2015) .

Plusieurs réflexions et valeurs exprimées dans des déclarations écrites ou orales :

Silvia Pérez-Vitoria plaide pour une remise en question du productivisme et pour une agriculture durable ; elle rappelle qu'à l'échelle de la planète, ceux qui vivent de la terre sont la moitié de la population totale. En France, les paysans représentent moins de 3 % de la population active ...

Elle alerte sur la réapparition en force de l'insécurité alimentaire ; elle indique que le système agroalimentaire dominant n'a pas pour but de nourrir la population, mais sa fonction principale est d'assurer un débouché et de fournir des matières premières à l'industrie !

Notre "grand témoin" de cette journée s'interroge sur le modèle agricole parce que c'est une question globale sur les sociétés dans lesquelles nous vivons.

Peut-on bloquer le processus de destruction des terres arables qui a lieu un peu partout ? Elle défend une agriculture paysanne "nourricière", tout en reconnaissant que les "portes de sortie" de l'agriculture industrielle sont difficiles à trouver !

Sa remarque est nette: l'agriculture est la seule activité indispensable à la survie de l'Humain.

Elle s'élève contre des faits graves :

. la tendance à la marchandisation généralisée de la nature ;

. la spoliation et la destruction des terres agricoles :

. la libéralisation grandissante des échanges agricoles .

  • Quelques unes des interventions de Silvia Pérez-Vitoria :

Silvia Pérez-Vitoria rappelle quelques faits. L'agriculture sert de débouchés à l'industrie, depuis plus d'un siècle, et sa main d'oeuvre a aussi constitué un vivier, un réservoir de "chair à canon" pour l' engagement des troupes de soldats, durant les terribles conflits mondiaux durant le 20ème siècle ... Ainsi, durant la Guerre de 1914-1918, les couches paysannes ont "payé un lourd tribut" à la victoire finale. Ensuite, les industriels ont utilisé l'agriculture pour la reconversion de leurs stocks de produits chimiques, en production d'engrais au lendemain de cette gigantesque hécatombe.

Conséquence de la logique capitaliste, beaucoup de paysans ont perdu leur autonomie, en devenant dépendants du crédit bancaire, et soumis à la pression de lobbies agro-industriels.

L'extractivisme industriel s'est développé au détriment de la pêche et de l'agriculture; exemple: les exploitations de mines pour obtenir des métaux rares nécessaires à la fabrication d'appareils ont souvent entraîné, outre la pollution de l'environnement, des conditions de vie très dures pour les mineurs, le saccage du paysage, la destruction de terres arables ou de sites d'élevages d'animaux . . .

Le droit à la terre est fondamental, faut-il le souligner ! La lutte contre l'accaparement des terres est de première importance, tout comme la création de ceintures vivrières autour des grandes villes, c'est la base d'une agriculture de proximité.

Un des objectifs prioritaires est la transition de l'agriculture industrielle vers la pratique généralisée biologique. Le secteur primaire doit être davantage promu, car il y a des opportunités à saisir. L'agriculture doit attirer davantage de jeunes, les débouchés existent; un changement commence à apparaitre dans l'éducation nationale; les mentalités doivent évoluer dans ce sens.

L'AMAP est un système de production parmi les plus efficaces, en matière sociale, sanitaire, culture agricole proprement dite. Les Réseaux régionaux des AMAP ont un rôle central à jouer sur le plan de l'éducation populaire pour la sensibilisation de l'opinion à une autre dynamique agricole innovante et responsable écologiquement.

Ne pas oublier que la "menace" urbaine est toujours là, surtout dans les mégapôles comme la Région francilienne, avec tout ce qui peut broyer des vies, mutiler des harmonies !

Une esquisse de conclusion "amapienne": nous pouvons dire que la ceinture de béton n'est pas la solution, tout comme l'univers artificialisé ou le tassement de la population ; il y a d'autres mondes possibles que la surconsommation et le gaspillage ! Vive la transition écologique et sociale !

Jean-Louis Michniak - AMAP de Colombes

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