27 sept 2019

Portrait : Yseult, la technique et l'ésotérique

Il y a trois ans, Yseult a quitté son travail de sage-femme pour se lancer dans le maraîchage. Après presque 15 ans à l’hôpital, elle avait besoin de grand air et de s’aligner avec ses convictions. Retourner à l’hôpital aujourd’hui, ce serait comme se mettre à cultiver des légumes en conventionnel.

© Anaïd de Dieuleveult / Hans Lucas

D'amapienne à paysanne

Yseult fait partie de ces amapien.ne.s qui se métamorphosent en paysan.ne.s : son envie de cultiver a grandi dans son panier. Membre du groupe de La goutte d’or pendant plusieurs années, elle a pris la relève après que le fils du maraîcher a décidé de laisser tomber. Le groupe a vécu une saison sans légumes dans l’intérim.

Pendant ce temps, Yseult partait faire son BPREA en Bretagne, ce qui lui a permis d’être au contact, au sein de sa promo, avec des jeunes souvent issus du monde agricole, qui lui ont beaucoup appris. Pour son stage chez Philippe Caron, en Seine-et-Marne, elle faisait les aller-retour Bretagne-Banlieue est.

Au bout du test agricole ... un GAEC ?

A l’issue de ce stage, elle a accepté un petit salariat de 5 mois chez un voisin, Boris Canal (vous savez le fameux, celui dont nous parlait déjà Moussa, ). Au bout de 5 mois, Yseult propose à Boris de créer une couveuse. Boris hésite, il est installé depuis 3 ans, sa ferme n’est pas tout à fait stabilisée. Yseult accepte de partager les risques avec lui et ils se lancent. Ils forment une équipe solide et leur tandem fonctionne bien depuis deux ans : ils prévoient de s’associer en GAEC d’ici la fin de l’année.

Ils cultivent 2 hectares en travaillant peu le sol et parviennent déjà à fournir une centaine de paniers à l’année. Ils visent les 110 pour 2020, et les 120 pour l’année d’après. Il s’apprêtent à louer un hectare de plus à l’autre bout du village. Terre de Liens les conseille pour la rédaction du bail. Il faut encore y installer l’irrigation, mais ils comptent bien y mettre quelques patates et quelques courges rapidement pour commencer.

Yseult livre deux groupes : un à Paris (qui était le sien) : La goutte d’or/La Chapelle, qui a accueilli 10 personnes en plus cette saison, mais dont elle souhaite qu’il reste à taille « humaine » (environ 70 personnes), et un autre à Romainville, Les pépins Punk, qui commence tout juste avec 10 paniers et 20 personnes, et qui est né de l’essaimage du groupe que Boris fournit à Bagnolet.

S'organiser, se former, et expérimenter

L’organisation des futurs associés est bien huilée : ils fournissent 60 paniers le lundi et le jeudi, à des horaires et dans des lieux suffisamment proches pour pouvoir se remplacer si besoin. En concentrant leur temps de récolte sur deux jours, ils peuvent ainsi dégager du temps pour se former et participer à la vie des réseaux. C’est ainsi qu’Yseult a pu rejoindre le Collectif du réseau des AMAP cette année.

Yseult habite à Paris, à dix minutes du lieu de distribution de son groupe dans le 18ème. Elle va à la ferme en Transilien, qui est devenu son bureau. A contre-courant des franciliens, dans un train désert, elle peut traiter en toute tranquillité toutes les tâches administratives. Elle passe la journée à l’air libre à la campagne et rejoint la ville le soir venu. Un rythme qui lui convient.

Chaque été, elle prend, comme Boris, trois semaines de vacances et se fait remplacer par un salarié saisonnier, recruté parmi les nombreux candidats à la reconversion. Ce qu’elle aime dans son nouveau métier, c’est le défi technique : regarder, observer pour tenter des trucs et s’adapter.

Mais c’est aussi son côté mystérieux et expérimental : cet été, toutes les fermes franciliennes ont été ravagées par les altises qui ont annihilé les choux. S’ils ont pullulé aussi dans les plants d’Yseult & Boris, au point qu’il a fallu enlever les voiles qui protégeaient les choux, ceux-ci ont repris et sont beaux aujourd’hui. Yseult ne se l’explique pas, ni pour ses navets et ses radis, eux aussi épargnés, si ce n’est que ces légumes là poussaient sur une parcelle où le sol a été peu travaillé. « Je ne suis pas ésotérique » répète-t-elle, mais peut-être que les choux ont trouvé dans le sol peu travaillé les ressources nécessaires pour repartir après le départ des ravageurs. Une première hypothèse qu’il faudra vérifier. Parce que « la nature est plus forte que nous », et ce qu’on appelle mystère est bien souvent simplement un défaut de connaissance.
Dans ses projets, il y a un atelier avec Farming Soul et l’Atelier Paysan pour fabriquer des outils pour l’aggrozouk, utiliser plus souvent les purins pour soigner les plantes par les plantes en agissant sur leur PH, installer des poules pour qu’elles picorent les larves des futurs parasites avant qu’ils ravagent les légumes (et mettre quelques œufs dans les paniers) et planter des fruitiers.

Expérimenter pour progresser et pour donner envie aux prochains. Le relais est enclenché !

Par Maud, administratrice du réseau AMAP IdF

À voir aussi

Agenda - Les prochains rendez-vous

Agenda - Les prochains rendez-vous

Nos formations, ateliers, évènements, ainsi que ceux de nos partenaires... Retrouvez ici toutes nos prochaines dates !